Gwendoline revint avec du café tout chaud et servit une bonne tasse à Pétunia et Philibert. Ceux-ci burent en silence. Gertrude Gédublé arriva à ce moment-là. Bien qu’essoufflée, elle fonça sur les Pochetrouhais et glapit d’une voie aigue :
- « Où est mon fils et comment va-t-il ? »
Gwendoline, choquée par ce manque de tact et de courtoisie, intervint :
- « Mère, vous n’êtes pas la seule rongée par l’inquiétude !! Et Gédéon s’est mis tout seul dans ces sales draps ! »
Gertrude lui répondit d’une voix haineuse :
- « Que m’importent les autres ! Et toi sale gamine, bien sûr, tu les défends. Rien d’étonnant après tout ! Je n’aurai pas dû m’attendre à autre chose de la part d’une bâtarde !! »
Gwendoline fit un pas en arrière devant cette insulte peu ordinaire. Elle ne comprenait rien aux paroles de sa mère. Elle allait lui demander des explications quand une violente détonation se fit entendre. Ciel, le pire venait d’arriver ! Le souffle de l’explosion avait partiellement détruit la grange et la porte avait été arrachée de ses gonds. Déjà, les flammes de l’incendie projetaient leur lueur sinistre dans la nuit. Le vent, tout heureux de cette aubaine, attisait l’incendie.
Philibert hurla :
- « Vite ! Tous aux seaux d’eau ! »
Puis il s’en versa un entièrement sur le corps et partit en courant vers la grange. Pétunia comprit ce qu’il allait faire et le supplia :
- « Oh mon Phil, sois prudent, je t’en prie… »
Il se retourna vers sa femme et lui dit tendrement :
- « Je vais chercher nos petits, mon Amour. Continue de mouiller la paille avec les seaux d’eau. Je reviendrai, je te le promets. Toi et moi, nous irons encore danser ! »
Puis il s’engouffra dans la grange d’où s’échappait la fumée. Des brindilles de paille enflammées montaient au ciel en voltigeant. L’heure n’était plus aux discours ni aux disputes. Dehors, les trois femmes se relayaient sans cesse pour arroser la grange.
La première personne que vit Philibert en entrant fut son fils inanimé face contre terre et coincé sous la poutre qui avait servi à bloquer la porte. Habitué à porter souvent de lourdes charges, le père parvint sans trop de peine à soulever la poutre. Puis il retourna doucement son fils et en le prenant sous les aisselles le tira hors de la fournaise. Aussitôt, sa femme accourut et l’aida à porter Phoebus à l’abri du danger. Il se versa à nouveau un seau sur la tête et retourna dans le bâtiment en flammes. La fumée faillit le faire suffoquer et la chaleur était intense. Il hurla :
- « Praline où es-tu ? Pitchoune, ma Pitchoune, réponds-moi ! »
Ce fut la voix de Gontran qui lui répondit :
- « Par ici, Philibert, nous sommes ici. Vite les flammes nous encerclent…»
Phil s’avança à l’aveuglette, guidée par la voix du père Gédublé. Il découvrit celui-ci allongé par terre, sa jambe faisant un angle bizarre. Peu enclin à la pitié, Phil l’apostropha :
- « Alors, où est ma fille ? »
- « Ici Père », répondit la jeune fille d’une voix étouffée. «Je suis allongée sous Mr Gédublé. Tu sais, quand tout a explosé, il a bondi sur moi et m’a plaquée au sol en faisant bouclier avec son corps »
Trop étonné pour faire un commentaire, Phil, inquiet, lui demanda :
- « Tu es blessée Pitchoune ? »
- « Non Papa, je vais bien mais je commence à manquer d’air ! »
Dans le prochain épisode : une angoisse insupportable…
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